samedi 24 septembre 2016

The Eric Andre Show

The Eric Andre show est une émission créée par Eric Andre. Déjà. Elle a pour particularité (entre mille autres) de ne durer qu'une dizaine de minutes par épisodes. Ça peut sembler chiche, mais en fait ces dix minutes lui suffisent à casser énormément de choses, et à provoquer tantôt le malaise, tantôt l'hilarité, tantôt une hilarité mal à l'aise. The Eric Andre show en est actuellement à sa 4ème saison et franchit, épisode après épisode, une succession de sommets. Il est donc urgent d'attirer autant que faire se peut l'attention sur cette émission, à laquelle on n'arrive pas à trouver d'équivalent (ou alors il faudrait jouer au critique musical en disant « Imaginez du Chris Morris mâtiné de Jackass surveillé du coin de l’œil par les Monty Python » ou quelque chose de ce genre, ce qu'à Dieu ne plaise).
Tous les épisodes de the Eric Andre show reposent sur une structure identique:
- le générique démarre, un orchestre de jazz joue le thème musical de l'émission, Eric Andre arrive en hurlant, démolit le décor, casse la gueule du batteur et fait ensuite n'importe quoi (à titre d'exemple, dans la dernière émission en date : se faire étrangler par une momie, se battre nu contre un ver de terre en dessin animé, déclencher des incendies par la seule force de son regard, manger un burger, et se faire casser la gueule par Tony Hawk en lui disant "Je croyais qu'on était amis !") tandis que la musique continue.


- le générique prend fin, (l'immense) Hannibal Buress entre en scène, aussi flegmatique que son comparse est déchaîné, et Eric Andre commence le traditionnel monologue d'ouverture. Il le foire à chaque fois (exception faite d'un tout récent où il répétait "mots, mots, mots, mots, punchline").


- il y a des invités qui, souvent, n'ont pas l'air de savoir à quoi s'attendre. Mais, et c'est là un des traits de génie de l'émission, le spectateur non plus. Il est proprement impossible de savoir, d'une seconde à l'autre, ce qui va bien pouvoir se passer dans cette émission, et l'inventivité malade d'Eric Andre semble sans limite. Un exemple vaudra mieux que des explications avec cette merveilleuse interview d'une vedette du fitness :


- les interviews sont entrecoupées de sketchs souvent filmés sur le vif, parmi les passants, et mettant en scène différents personnages incarnés par Eric Andre. Exemples, dans le dernier épisode en date toujours : Kraft Punk le robot chanteur qui éjacule du fromage, un père de famille ayant eu la mauvaise idée d'attacher le couffin de son bébé à des ballons d'hélium (et qui trouve le temps, entre deux tentatives pour le sauver, de faire son examen de conscience en voix off), ou encore un infirmier tentant de réanimer une femme ayant perdu conscience en lui faisant l'amour en pleine rue. Là encore impossible de savoir ce qui va se passer, les rebondissements sont infinis et on a en fait le sentiment de voir un flux de conscience malade se matérialiser à l'écran. C'est encore une fois difficile de rendre compte de l'expérience avec des mots mais l'effet est saisissant, et les ruptures de ton provoquent un étonnement de chaque instant, et une admiration absolue.


- vient enfin en conclusion une séquence musicale, ou un stand up, ou une animation, mais qui ne ressemble là encore à rien de connu. On garde un souvenir ému de cette fois où le groupe de metal Exhumed et les Supremes avaient été amenées à chanter chacun une chanson de leur répertoire en même temps. La cacophonie était totale et tandis que les unes chantaient une bluette, les autres faisaient un boucan de tous les diables pendant que leur chanteur se faisait vomir. C'était purement et simplement prodigieux.


En somme la seule chose à faire pour saisir la portée du phénomène et ne pas passer à côté de le meilleure émission comique de notre époque est de regarder the Eric Andre show. Ça peut être traumatisant, ne le cachons pas. Mais la liberté totale et la violence anarchique et créative de la chose provoquent une joie au-delà de toute mesure. Et puis une chose achève de nous rendre cette émission excessivement sympathique : au fond Eric Andre pulvérise toutes les conventions (morales, narratives, constitutives même d'un spectacle comique adressé à des spectateurs) et, hors de toute mise à distance de soi-même, hors de toute recherche de connivence, il semble faire tout ça sans même y penser. Et ça c'est magnifique.

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