Ce qu'est et ce qu’évoque Pre-millenium tension, ci-devant 3ème album[1] de Tricky:
- l'impression de réveiller l’animal enragé qui nous sommeille dans les entrailles, puis de le sentir remonter jusqu'au creux de l'oreille pour nous susurrer des paroles pleines de colère et de séduction.
- un rire avec la bouche pleine de sang.
- l'inspiration pure gravée sur sillons.
- la preuve que la violence n'est pas à éradiquer, mais à canaliser.
- "Even got God scared. Even
got
God scared"[2]
- les mots qui semblent sortir d’eux-mêmes et cognent comme quinze uppercuts.
- une libération du carcan "trip-hop" dans lequel Tricky avait été enfermé à son corps défendant, un disque de punk pur et dur enregistré en Jamaïque et nourri de hip-hop et d’esprit rastafari.
- un influx qui parcourt le corps en réchauffant la colonne vertébrale et donne intérieurement naissance tantôt à une danse serpentine tantôt à un trépignement extatique.
- la certitude qu'un gringalet pourrait mettre K.O. une montagne de barbaque s'il a en tête le beat de « Tricky Kid ». Cette certitude qui vient de ce qu'est Tricky: un gringalet qui met K.O. quiconque se sent concerné par sa musique et ses mots.
- ce gigantesque majeur tendu à la facilité, à la recherche de proximité, de connivence avec l'air du temps et le joli (pas le Beau, le joli).
- le démembrement de la musique, la dislocation de son squelette, et la création à partir de ces éléments d'une créature monstrueuse et fascinante.
- l'absence de crainte face aux choses les plus nocives qui dorment en chacun; l’idée qu’il faut les charmer par une musique profane qui n'obéit pas à la joliesse pour la simple et bonne raison qu'elle ne s'adresse pas à l'amateur d'harmonie, mais au vivant qui sent parfois son corps se tendre de violence à l'encontre d'un tout indéfinissable.
- dans toute l'histoire du jeu d'écho entre deux chansons on a rarement fait aussi bien que Tricky et sa citation du « Message » de Grandmasterflash & the Furious Five dans « Vent ».
- ressentir les effets des drogues dures sans avoir à se coltiner les mauvais côtés de la chose.
- l’alchimie parfaite avec la presque omniprésente voix douce de Martina Topley Bird.
- la douceur qui cache le poison, le poison qui cache la douceur.
- écouter « Sex drive » et à se sentir pousser quinze jambes et trois cœurs pleins de sève.
- une poésie de la fièvre qui naît de l'instant où une tension atteint son point de non-retour.
- une poésie pré-millénaire mais post-apocalyptique. Celle d'après la révélation.
- la matérialisation de ces tensions pré-millénaires, qui résonne comme l'expression parfaite de tensions post-millénaires, de la vie intérieure qui tourne de bonne foi au vinaigre.
- " To the noose, to the neck, to the boost, to the check, to the micic, to the psychic, to the circuit, to the games, pays to blame, to the freedom, make it rain, make it sane, make it dance, not a chance, see her run, see her come, take her kindly, she is dark eyed, no soul, no soul" [3]
- cette sorte de paix intérieure qui nous saisit une fois qu'on a regardé en face et apprivoisé ces élans mauvais qui nous meuvent, une fois qu'on a apprivoisé toutes ces choses indicibles qui nous éreintent et que Tricky séduit puis transforme en fleurs sombres.
Un magicien, un prophète, une catharsis, un dieu du feu intérieur né à Knowles West, les sept shofars autour de Jéricho en un seul homme, un Aguirre qui entraînerait toute une armée à sa suite dans une jungle impénétrable pour le plaisir de la voir s'y perdre irrémédiablement, Baudelaire qui aurait fait de la boxe… Ce qu’est et ce qu’évoque Tricky.
Son meilleur à ce jour à mon humble avis !
RépondreSupprimerSans doute oui, ou en tout cas celui qui allie le mieux le côté expérimental et le côté accessible de sa musique, le plus équilibré en fait.
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