Au
début tu n'entends rien. Tu n'es pas habitué, les chansons
normalement elles n'attendent que toi pour commencer... Tu regardes
autour et rien ne vient qu'un bruit qui s'épaissit, une vibration
inamicale qui finit par s'effiler en charpies d'étincelles.
Alors
tu comprends: la musique a traîné en route et, perdue dans ce sur
quoi ses yeux se posaient, elle t'a fait attendre. A présent elle
est là et elle te raconte tout.
(le
vert de l'herbe
le
blanc de la neige
la
vérité que, seule, je veux connaître)
Tu
ne crains pas les promenades lentes. Et puis, même, tu décides de laisser un temps le monde tourner. Toi
dessus, tu tournes au même rythme. Nagisa Ni Te a l'air de trouver
que c'est bien. Ça flotte comme suspendu, ça traîne franchement
pour qui ne sait pas se laisser habiter par un air venu du dehors,
mais Nagisa Ni Te trouve que c'est bien et toi tu décides, pour une
fois, de te laisser porter.
(Tout
va bien, me dis-tu: ton âme peut m'éclairer à tout moment)
Chez
toi, dans le dehors, le ciel passe parfois des jours à ne rien
laisser filtrer. Alors parfois tu cherches et fugacement tu trouves
de la lumière dans des yeux noirs. D'autres fois ils regardent
ailleurs et tu sais qu'il ne servirait à rien de chercher où ils
vont : c'est loin et c'est impénétrable. Sans doute ils ne te
raconteront ensuite pas leur voyage, et c'est comme ça et c'est un
peu beau malgré tout, parce que quand même ils naviguent et tu
perçois des reflets de choses quand ils reviennent à toi.
Parfois
tu penses que si on est affamé on est condamné à crever de faim en
permanence. Parfois tu crèves de faim, tes épaules commencent à
faiblir sous le poids, sous un poids.
Nagisa
Ni Te repeint le décor, tu ne penses plus au mouvement, tu t'es
arrêté depuis longtemps déjà (ou depuis quelques secondes
peut-être), tu regardes tout autour et ce qu'il y a existait déjà
avant, mais vient d'être réinventé par la musique (« Le
nouveau monde »). Ça et d'autres choses, tu en viens à douter
d'avoir jamais été angoissé ou effrayé, puisqu'il peut exister
une telle douceur tranquillement lascive. Et parfois revient cette
sorte de bruit pointu; il finit par s'effacer devant la langueur mais
il est là. Il faudra faire avec; à danser d'un pied sur l'autre tu
perdras parfois l'équilibre et puis après? Tomber et se relever, tu
sais faire depuis des années déjà.
(L'obscurité
de la nuit
La
distance des étoiles
Même
les souvenirs de voix à présent disparues)
Oui,
ce qu'il y a c'est que dans un rêve il y avait quelqu'un de mort
depuis des années. Ensemble vous faisiez un voyage que vous n'avez
jamais pu faire et, dans ton rêve, tu te demandais sans cesse "mais
pourquoi sommes-nous restés tant de temps sans nous voir?"
Les
paysages s'accordaient à cette chanson, ils étaient vastes et
caressés par le vent.
Tu t'es réveillé sans amertume.
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